Au Cambodge, on est « pour » ou franchement « contre » les trop nombreuses associations dites ONG, ou NGO in English, (le record du monde du nombre, parait-il, ce serait le Cambodge devant Haïti !).
A voir travailler les « bénévoles » avec des frais de séjour équivalent à de confortables salaires locaux, roulant carrosse, au volant de voitures puissantes, respirant des attitudes « colones », le questionnement est inévitable.
Le pire cliché révoltant des organisations d’aide et d’assistance relève du domaine financier privé. La grande maison du micro-crédit, d’abord associative trouble la vue aujourd’hui à chaque déplacement en province, la Banque ACLEDA. Trop, c’est trop !
En effet en 1993, les bailleurs de fonds internationaux arrivant les poches bien garnies cherchaient à distribuer l’aide financière au développement avec une certaine sécurité. Passer par des ONG limitait sans doute les risques de corruption et de déperdition ? L’argent largement distribué à la porte des institutions gouvernementales repassait par les fenêtres privées… Dans ces conditions, comment faire bouger les campagnes qui représentaient 85% de la population. ACLEDA a profité de véritables « dons » des Etats donateurs. L’argent public a lancé une banque.
Des Organisations dites Non Gouvernementales, bénéficiant de plein de « programmes-donateurs » se mirent à faire du micro-financement de petits projets. Le micro-crédit était alors à la grande mode Bengale… ! Facile de prêter de l’argent avec l’argent des autres (!) surtout lorsque ceux-ci n’y regardent pas de trop près. Bien vite, des dérapages apparurent.
Le Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD) encouragea judicieusement la création d’une Association cambodgienne LEDA, évidemment en langue anglaise, tous les francophones passés par le PNUD se faisant forts de ne pas montrer qu’ils parlaient le français, pourtant langue officielle de l’ONU. Chaque pays donateur encourageait le micro-crédit rural pour espérer faire bouger les campagnes et relancer production agricole et élevage. La France offrait ses aides sous forme de dons (AFD), l’Allemagne (GTZ), la Suède (SIDA) et bien sûr l’américaine US’AID. L’Union Européenne avait à l’époque des actions très performantes pour le développement rural de certaines provinces et ses fonds passaient par le programme PRASAC, y compris celui du micro financement.
En 1998, les donateurs dont les importants programmes d’urgence venaient à échéance (après le « coup d’Etat » de 1997 !) eurent l’idée d’encourager le regroupement des structures de financement du micro-crédit autour d’une seule Association qui devait devenir une « banque » afin de mieux garantir l’accueil de ces fonds disponibles dont on ne savait que faire. AC-LEDA association devenait ACLEDA banque. Belle idée ? Ce fut fait …
Sauf que les Cambodgiens l’appellent A, C, ou … plutôt : assez-Leda !
Aujourd’hui, ACLEDA, l’une des plus puissantes banques du Royaume du Cambodge, ne fait pas oublier aux observateurs, ni ses méthodes et leurs conséquences, ni les dérapages permanents du » micro-crédit » depuis deux décennies, avec des taux d’emprunt à très court terme de 3%. Attention, pas par an mais au mieux 3% par mois. Parfois 10 % par mois le temps d’une saison agricole sur quatre mois (le cycle du riz !). Le pire est en cours : la création d’entreprises de micro-crédit !
De nouvelles petites unités bancaires prétentieuses (Institutions de Microfinance !) continuent à se multiplier à travers le pays devant ce pain béni des gains faciles initiés par ACLEDA. Avec des fonds flottants. Toujours du court terme à taux forts. Vite fait, bien fait. Les poches pleines après avoir vidé les autres. Opération « usure au grand jour » et portes ouvertes sur les voleurs.
en effet, bien des petits fermiers incapables de lire un contrat de prêt ont perdu la propriété de leur rizière mise en gage par le prêteur usurier. Le micro crédit est aussi une arme de destruction … ! Combien de perdants ? – Un scandale national qui émeut peu et qui enrichit quelques-uns.
Allez-y les petits prêteurs, achetez des fauteuils en cuir noir ! Les pauvres paysans, à la peau dure de même couleur, restent incultes, c’est votre chance. Les Khmers Rouges avaient supprimé la monnaie, les Khmers de l’argent noir sont arrivés avec leur capital ravageur pour participer au développement économique. Pas celui des laissés-pour-compte.
La grande banque prêteuse et prétentieuse dont l’association originelle reste au quart du capital, demeure une adepte de la petite consommation et sa stratégie en fait une nouvelle banque à la conquête … des petits budgets. En pleine expansion. En ville et à la campagne, sur toutes les routes nationales, ses « branches » sont très visibles. Sans cesse, une nouvelle splendide construction bleutée…
Du solide ! Du capital. Du frais, du cash, en riels ou en dollars ? Sans scrupule. Maxi profits sur le développement rural. Sans vergogne. Au Cambodge, les « casinos » expose leurs gains… Comment devenir riche ?
Et maintenant la même ACLEDA annonce qu’elle va … s’exporter, s’implanter dans les pays voisins. Bravo pour ce succès… Ce sont souvent sur des cimetières qui ne peuvent plus crier qu’on construit de nouvelles églises.
Ainsi va la vie, ainsi va la banque … qui se voulait « associative », voire humanitaire. Le Cambodge de 2015 n’est vraiment plus le Cambodge de 1995. Qui s’en plaindra ?
Sûrement pas les O.N.G. !?
– Sûrement pas ACLEDA car la banque vient d’être choisie à nouveau par l’Agence Française de Développement (AFD) pour y déposer en 2015 « ses » fonds destinés aux actions programmées d’assistance aux campagnes ! In… croya bleu … ment !