J’ai ouvert la porte
Devant moi un couloir sombre. Il semblait bruyant et animé mais résonnait de silences assourdissants.
Refus d’avancer.
Derrière moi un inconnu me pousse
Des mains à chaque épaule
Comme un genou dans les reins
Mon bas de dos subit des poussées et des picotements
Qui me veut faire franchir cette porte ?
On me pousse. Une voix : ne te retourne pas.
Même ambiance. Je croise le regard du deuxième étage.
Lit vide.
Ce sont ces mains qui m’écartent vers l’avant
Derrière quelqu’un se sauve en courant.
On dirait un jeunette. En pleine croissance.
Même de dos, elle sourit en sautillant.
Comme pour s’enfuir plus vite et me laisser planté là.
Les pressions s’accentuent.
Hey ! Suis pas pressé !
Une main tenant la porte entrebâillée
Je la reconnais, c’est celle qui travaillait.
A la « retraite » plus de mains,
à peine un demain.
Je résiste mais la poussée me fait les poches. Elle m’enlève les médailles, les breloques et même les diplômes.
Mes choses sûres s’envolent.
Dans le courant d’air une canne, une loupe, un chausse-pied me cognent
En un éclair, la porte se claque et soudain disparaissent aussi mes souvenirs, les points de repères, mes vases, mes pots, mes livres, mes traces,
le bouddha tant aimé, le fauteuil chinois,
la photo jaunie,
La mèche de cheveux blonds de mon enfance.
Une autre porte s’ouvre, à côté de l’échelle
Elle respire le bonheur, pas moi,
Une lueur, Une lumière,
Un panneau clignote : « vous arrivez au troisième ». Allez tout droit !
Un couloir. Des lignes. Des marches.
Des rails. Oui, déraille …
Et tout au fond un tunnel ?
Je m’arrête. Vite, une autre porte. Pericoloso sporgersi !
De l’air. Enfin de l’air …
Pas d’escalier, un mur. Comment franchir cet obstacle . C’est au pied de l’échelle qu’on voit le maçon.
Plus rien, plus d’échelons, que le vide…
Et la peur ?
Depuis ma jeunesse on m’avait encouragé à monter. J’ai couru sur l’échelle…
Qui pour apprendre à descendre ?
Personne…
Sauf en poésie, mieux vaut la descente que la chute.
JMDF / 2017